La Tribune Septembre 2008

La Tribune Septembre 2008
Septembre 2008 - L'actualité du jour dans les domaines économique et financier

L'Art déco toujours très haut

La cote de l'Art déco reste au beau fixe, mais les pièces moyennes sont boudées par les amateurs. Les ventes de novembre à Paris offrent l'occasion de retrouver le mobilier de créateurs connus QU à redécouvrir.

Le style Art déco s'est développé dans les années 1920 dans un contexte social en mutation. Fini les lambris des hôtels particuliers, bienvenue au confort et à l'hygiène des appartements fonctionnels. Tournant le dos aux sinuosités de l'Art nouveau, les meubles abandonnent sculptures et bronzes pour une phis grande simplification des formes. Conformes à notre esthétique actuelle, ces objets ont vu leurs prix s'emballer ces dix dernières années. Le passage au xxie siècle a accentué l'aspect historique de cette période, conférant à l'Art déco un statut de « grand classique » au même titre que la crème du mobilier au xviiie siècle. La vente de la collection Claude et Simone Dray en 2006 chez Christie's à Paris a pu donner la mesure de la hausse. Une paire de jardinières d'Armand-Albert Rateau, adjugée pour 3,1 millions de francs chez Tajan en 1994, fut alors achetée pour le prix record de 4,1 millions d'euros par la galeriste Cheska Vallois (Paris). Dans la même veine, un cabinet d'angle de Jacques-Emile Ruhlmann, vendu pour 700.000 francs en 1995, est parti pour 1,5 million d'euros. « Voilà dix ou quinze ans, l'envolée du marché était très spéculative et s'appliquait avec beaucoup moins de discernement à tous les niveaux.

Les longues années de crises financières ont marqué les esprits et contribué à rendre les amateurs plus prudents, clairvoyants et exigeants. » De fait, le couperet tombe sur la marchandise moyenne. Les meubles de chambre à coucher, coiffeuses et autres lits sont difficiles à vendre, faute d'épouser notre mode de vie. En revanche, un nouvel intérêt se dessine depuis cinq ans pour les objets en céramique, devenus des compléments de décoration à part entière. Les collectionneurs délaissent aussi le néotraditionalisme pour des pièces plus modernistes. Néanmoins, l'Art déco version tubulaire métallique et verre étant rare sur le marché, l'appétit se porte sur le « luxe pauvre » du décorateur Jean-Michel Frank. En juin 2006, une table basse en galuchat de ce créateur, issue de la collection Rockefeller, s'est propulsée à 450.000 dollars. Gare toutefois aux faux Frank qui ont pollulé sur le marché ces dernières années. Une polémique est aussi née des meubles supervisés par le décorateur en Argentine.

Dans un contexte où la clientèle se montre à la fois avide et sélective, quelques signatures méconnues et a fortiori sous-estimées se font une place sur le marché. C'est le cas d'Eugène Printz, créateur au raffinement discret, et dont Sotheby's propose le 26 novembre à Paris un bureau estimé 150.000 200.000 euros. Autre exhumation à l'oeuvre depuis trois ou quatre ans, celle de la maison, Dominique. Fêtée dans les années 1920 par les revues de décoration, cette enseigne a fini par incarner un juste milieu dénué d'extravagance, un goût de bon père de famille. Willy Huybrechts (Paris) qui lui a consacré son stand entier à la dernière Biennale des antiquaires à Paris en septembre a vendu la quasi-totalité des meubles dans une gamme de 50.000 à 300.000 euros. Mais un grand tri s'impose dans la production de cette maison dont il faut surtout retenir les créations entre 1927 et 1937. Dans un genre plus moderniste, le Lyonnais André Sornay, célèbre pour sa technique du cloutage, sort lui aussi des oubliettes depuis quatre ans. Ordonnateur de cette réhabillitation, le marchand parisien Alain Marcelpoil vend ses pièces entre 15.000 et 150.000 euros.

ROXANA AZIMI

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